De Stop DSM à post-DSM. Conclusion de la journée et perspectives – Tristan Garcia-Fons

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Le système DSM est nuisible

– Il conduit à l’extension du domaine de la pathologie

– Et en particulier, le DSM a inventé un nouvel enfant malade ou handicapé dès lors qu’il ne répond pas aux nouvelles normes de conduites

– Il vent une pseudo science réductionniste qui n’est qu’un système de croyance, de marketing ou de propagande politique, déconnecté de la clinique et de la réalité de la vie des gens.

– Il stérilise la pensée et la recherche

– Il contribue à une surmédicalisation et une surprescription dangereuse et couteuse. Cette surmédicalisation pose un problème de santé publique et de bénéfice/risque sans s’occuper du réel service rendu aux personnes.

Comment poursuivre à la suite de la journée d’aujourd‘hui qui marque certainement une étape dans notre combat contre le DSM ?

Il ne s’agit pas seulement de dénoncer ce « dispositif » (comme l’a dit Manuel Rubio) nuisible, dépassé mais qui perdure, continue de nuire. Le démonter ne suffit pas. Il faut le combattre et en monter un autre.

Pour cela, nous demandons :

– L’abandon de la référence unique au DSM et l’utilisation des classifications alternatives : Pour le codage des patients dans le RIM-Psy, la CFTMEA et la future CFTMA (qui en est actuellement au stade de son expérimentation) doivent être utilisées en première intention avec leur transcodage en CIM.

La Haute Autorité à la Santé doit cesser de se référer en premier lieu au DSM pour l’élaboration de ses recommandations. Le ministère de la Santé et le secrétariat d’état aux personnes handicapés, le ministère de l’Education Nationale et le sous-secrétariat d’état à la recherche doivent être garants de la pluralité des approches et du respect de la prise en compte des avancées scientifiques en psychiatrie. Plutôt que de dicter aux professionnels ce qu’ils doivent penser et faire (comme l’a fait encore la secrétaire d’état Ségolène Neuville), ils devraient promouvoir des groupes de travail et de recherches indépendants, représentatifs des professionnels concernés sur l’élaboration et l’utilisation des classifications en psychiatrie.

– La nomination, au sein de l’OMS, d’experts français indépendants des groupes de pression, pour élaborer une classification internationale des maladies non calquée sur le DSM pour aller vers une nosographie commune (« la moins pire », comme cela a été dit), ancrée dans la clinique et validée par l’ensemble des différents courants de pensée.

– Libérer la recherche et l’enseignement de l’emprise du système unique DSM :

La pensée unique DSM stérilise la recherche et appauvrit la formation des professionnels. Il faut développer la recherche clinique et les études de devenir.

Les programmes d’études de médecine, de psychiatrie en particulier, de psychologie ainsi que les formations paramédicales doivent enseigner de façon critique et plurielle l’histoire et la diversité des classifications nosographiques psychiatriques et pédopsychiatriques. Le DSM doit cesser d’être un manuel d’enseignement de la psychiatrie pour les étudiants et un ouvrage de référence pour les médecins généralistes qui sont les premiers prescripteurs de psychotropes en France.

– Les services de l’état et du parlement doivent diligenter des enquêtes sur les prescriptions de médicaments psychotropes en France et sur l’influence des entreprises pharmaceutiques dans ces prescriptions. Il faut en finir avec le lobbying désastreux et dispendieux des laboratoires. Garantir des études et recherches indépendantes, faire connaitre les études qui démontrent l’inutilité ou la nocivité des spécialités pharmaceutiques prescrites de façon abusive ou inadéquate.

Nous appelons au boycott du DSM 5 :

Entendons-nous : lisez-le si vous voulez savoir précisément à quel danger vous souhaitez échapper ou pour pouvoir le critiquer, mais ne l’achetez pas et ne l’utilisez pas.

Essayez de parler une autre langue que la novlangue du DSM. Renouez avec la vôtre, et celle des autres, dans sa diversité et sa créativité.

Nous ne gagnerons pas la bataille contre le DSM si nous restons entre professionnels de la profession. Nous ne sommes pas seuls et nous n’avancerons pas seuls pour passer au Post-DSM.

C’est pourquoi, nous appelons au plus large débat public dans l’espace social avec tous ceux qui se sentent concernés : les usagers de la psychiatrie, mais aussi les acteurs de la société civile, parents, enseignants, médecins, élus politiques, etc.

Il est urgent que se développe un débat public sur le surdiagnostic et la surmédicalisation de l’enfance. Sur l’école, en particulier, qui doit cesser d’être un lieu de diagnostic et de prescription médicale comme elle le devient actuellement.

A l’issue de cette journée, nous allons réfléchir à des propositions d’actions que nous pourrions lancer prochainement. Nous pensons notamment à :

Lancer un appel à signer et à adresser aux élus et responsables politiques sous forme de cartes, messages, et au moyen des différentes technologies de l’information et de la communication

Organiser de nouvelles conférences sur les catégorisations les plus sensibles (dépression, autisme, agitation, …) prenant en compte la pluralité des approches, avec des experts indépendants des groupes de pression et non endoctrinés à la pensée unique (Vous êtes ces experts. Ces experts sont parmi nous qui travaillons au contact des réalités humaines de terrain)

Des conférences pour élaborer de nouvelles recommandations, alternatives à celles de l’HAS, non opposables à la variété et la richesse des pratiques adaptées au cas par cas, prenant en compte la clinique individuelle du sujet avec son histoire et dans son environnement.

Ainsi, avec vous tous qui pouvez porter et diffuser ces revendications et ces actions, nous pouvons avoir bon espoir que nous en finirons avec le carcan du DSM.

Tristan Garcia-Fons

Je remercie Allen Frances et Pat Bracken qui ont répondu à notre invitation et tous les intervenants de cet après-midi, ainsi que les associations et les personnes qui nous apportent leur soutien.

novembre 23, 2014

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